Chinoises

Xinran est une journaliste radio chinoise qui interrogeait des femmes sur leur condition. Cela l’a amenée à rencontrer nombre d’entre elles, sans parfois pouvoir toujours en parler sur les ondes pour des raisons de censure. Cet ouvrage, publié alors qu’elle a quitté son travail et vit en Angleterre, revient sur un panel d’histoires tragiques, forcément émouvantes, parfois dures. Certaines sont liées à l’histoire du pays et ses tumultes, notamment pendant la révolution culturelle, néfaste aux familles bourgeoises. D’autres ont trait à la méconnaissance de la sexualité. On y trouve également des destins de femmes ayant vécu pendant des catastrophes naturelles. Ou d’autres ayant connu le drame du viol. Ces tranches de vie reflètent donc la Chine d’une part mais pas seulement, certains récits n’ayant pas de caractère politique ou culturel marqué et relevant plus de la condition de la femme en général. Le style est clair, le ton employé un peu engagé mais peu polémique: il s’agit de s’en tenir aux témoignages même si forcément quelques critiques sont livrées au passage. Pas forcément toujours à l’encontre du parti, mais aussi vis-à-vis du manque d’humanité en général.


Cela démarre par l’histoire d’une fillette livrée à un vieillard dans un village paysan, qui la tient en captivité. C’est ensuite une fille violée continuellement par son père qui tente de rester à l’hôpital; ce sont les vues d’une étudiante sur les relations hommes femmes et comment en tirer parti; une chiffonnière dévoile son histoire et comment elle vit pour juste apercevoir son fils en ne nuisant pas à son ascension; des mères ayant survécu à un tremblement de terre et perdu leurs enfants ont monté un établissement pour recueillir les orphelins touchés; une lesbienne tombe amoureuse de Xinran, l’occasion d’évoquer l’homosexualité; une femme se voit infligée un mariage arrangé, non par sa famille mais par la révolution; une amoureuse attend de retrouver son amant pour découvrir qu’il a refait sa vie entre temps; la fille d’un général du Guomindang se voit contrainte de cacher ses origines; Xinran évoque sa jeunesse, passée en privations et vexations du fait d’une famille aisée, suspecte aux yeux du parti; une femme d’origine japonaise est violée sous couvert du parti; Une femme à la mode décrit sa vie amoureuse malheureuse; dans une zone du pays encore défavorisée, hommes et femmes survivent dans des conditions archaïques, les femmes étant partagées mais curieusement, ne connaissant pas de points de comparaison, ce sont les chinoises les plus heureuses de leur condition de tous ces témoignages tragiques.
Chinoises
Editions Philippe Picquier
texte: Xinran
couverture: Ingo Jezierski, calligraphie de Ruth Rowland
2003
Kane Alkins

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